
© Nihon Mingeikan Tokyo - Bol en terre cuite
Introduit dans le Japon de l’entre-deux-guerres par le collectionneur et penseur autodidacte Yanagi Soetsu, le mouvement Mingei, littéralement l’art du peuple (min pour peuple, gei pour art ou savoir-faire), désigne l’art des objets ordinaires.

© Nihon Mingeikan Tokyo - Crémaillère
Plutôt qu’une école ou un style, le Mingei est une philosophie qui cherche à reconnaître et revaloriser l’artisanat populaire. Celui des objets que nous sommes tellement habitués à voir que nous ne les regardons même plus. Celui des anonymes. Des objets créés pour être utiles, sans intention esthétique, mais où s’exprime malgré tout une forme de beauté dans leur solidité, leur simplicité, leur robustesse.

© MUJI - Unglazed pot

© MUJI - Stone pot
Le Mingei naît du désir de rendre visibles ces objets sans signature et valoriser l'art populaire japonais, à l’inverse du design tel qu’on le conçoit aujourd’hui. Il ne s’agit pas de dire que l’artisanat est de l’art : l’objet Mingei est là pour servir. Mais cela n’exclut pas qu’il ait une présence, une beauté propre. Une beauté qui vient de l’usage et du geste.

Exposition MINGEI MUJI Canal City Hakata
"L'objet ordinaire est mingei : l'art du peuple"
Soetsu Yanagi
Dans la lignée du mouvement Arts & Crafts britannique de la fin du XIXe siècle, qui promouvait la réhabilitation du travail fait main et la sauvegarde des savoir-faire traditionnels, le Mingei s’en distingue par son attachement aux objets sans auteur, transmis par un effort collectif. Les rencontres de Yanagi avec les fondateurs des Arts & Crafts ont compté, mais sa pensée suit une autre voie.

« Un ustensile devient d’autant plus beau qu’il est plus utilisé, et plus il est beau, plus on l’utilise. »
Soetsu Yanagi
À partir de 1924, Yanagi entame des voyages à travers l’archipel japonais, la Corée, la Chine et Taïwan. Il collecte, archive, documente. Pour lui et ses proches, les expositions et les publications sont des moyens essentiels de transmission. Entre temps, l’exposition “Nihon Mingei” et la parution du manifeste La beauté des objets ordinaires en 1926 marquent la naissance officielle du mouvement Mingei.

Exposition MINGEI MUJI Canal City Hakata

Dix ans plus tard, le musée Nihon Mingei-kan ouvre ses portes à Tokyo. Avec sa scénographie digne d’un musée d’art, il replace les objets dans une économie du geste et du territoire. Il contribue à leur reconnaissance, et à la sauvegarde de certains artisanats régionaux.

Exposition MINGEI MUJI Canal City Hakata
Depuis, le Mingei n’a jamais complètement disparu. Il revient par vagues successives, même si son sens originel est parfois détourné. Plus qu’un engouement pour l’artisanat, ce retour dit autre chose : un besoin de redonner du sens à l’objet, dans un monde saturé de productions sans ancrage ni durée.
Un changement de regard, qui continue de faire école.